La politique sanitaire favoriserait la flambée des césariennes en Afrique

L’article en un coup d’œil

  • La politique de santé maternelle encourage la césarienne pour éviter les douleurs maternelles et fœtales
  • L’âge de plus en plus précoce ou avancé des parturientes contribue à hausser la proportion des césariennes
  • Certains hôpitaux rallongent la liste en pratiquant des césariennes dites de complaisance ou économiques

« C’est un fait de société qui inquiète beaucoup de femmes et d’hommes parce que les statistiques sont alarmantes par rapport aux époques passées et beaucoup se demandent ce qui explique cet accroissement des accouchements par césarienne ».

Chantal Faida, présidente de l’ONG Umoja (unité en swahili) qui milite pour les droits des femmes en République démocratique du Congo (RDC) se fait ici le porte-voix d’un grand nombre de personnes qui s’inquiètent de la montée en flèche des accouchements par césarienne en Afrique subsaharienne.

Certes, de façon générale, la part des accouchements par césarienne dans les pays du continent est encore en dessous des 10% à 15% fixés par l’OMS comme seuil idéal au-delà duquel la situation peut être considérée comme préoccupante. Mais, cette proportion augmente rapidement…

“Grâce à ces équipements, la césarienne est maintenant une intervention d’environ 15 mn au cours de laquelle il y a peu de risques. Donc, les gens font plus rapidement recours à cette intervention que par le passé”

Idi Saïdou, épidémiologiste, ministère de la Santé publique du Niger

Au Mali, par exemple, le nombre de femmes qui accouchent par césarienne a presque doublé en une décennie. Selon l’annuaire 2022 du Système national d’information sanitaire et social du Mali (SNIS), le pays avait enregistré 23 277 accouchements par césarienne en 2011 contre 45 601 en 2021 et 45 842 en 2022.

Chantal Faida rapporte que dans son association, « quatre femmes sur dix affirment avoir accouché par césarienne en dépit du fait que leurs consultations prénatales se soient passées normalement et que les médecins qui les suivaient leur aient dit que l’accouchement se passerait par voie basse ».

A en croire Idi Saïdou, épidémiologiste au ministère de la Santé publique du Niger, « s’il y a beaucoup de césariennes aujourd’hui, c’est surtout lié à la nouvelle politique de santé maternelle et infantile qui a cours un peu partout dans nos Etats ».

Selon ses explications, cette politique veut que la mère ne perde pas sa vie parce qu’elle doit enfanter. « Ainsi, face à une grossesse, il y a une certaine estimation technique qui est faite. Si on en déduit que l’enfant ou la mère va souffrir, alors, on décide de pratiquer la césarienne », dit le médecin.

Michelle Gonto Kouame, sage-femme à l’hôpital général de la ville de Dabou en Côte d’Ivoire, le confirme : « On se trouve à un niveau où il n’y a plus d’hésitation pour sauver la vie de la mère et du nourrisson. Au niveau de la maternité où je travaille, on ne prend plus de risques en essayant car, dès que l’accouchement par voie basse présente un risque, l’indication de la césarienne est posée », dit-elle.

L’autre raison principale est le revers des progrès enregistrés en Afrique ces derniers temps en termes de disponibilité de la main d’œuvre qualifiée pour réaliser les césariennes. C’est par exemple le cas du Mali, tel que le décrit Amadou Bocoum, secrétaire général adjoint de la Société malienne de gynécologie-obstétrique.

« Depuis 2009-2010, dit-il, il y a une augmentation du nombre de gynécologues au Mali liée à la formation locale. Donc, depuis 2010, il y a au moins une quinzaine de gynécologues qui sortent chaque année des écoles. Ça permet d’avoir sur le terrain des prestataires qualifiés qui peuvent poser les indications de césarienne à temps ».

Dans le même ordre d’idées, Idi Saïdou attribue une part de responsabilité dans cette hausse des césarienne à l’amélioration du plateau technique des établissements de santé : « Il y a également la disponibilité des moyens techniques. Grâce à ces équipements, la césarienne est maintenant une intervention d’environ 15 mn au cours de laquelle il y a peu de risques. Donc, les gens font plus rapidement recours à cette intervention que par le passé ».

Patient Wimba, gynécologue-obstétricien aux cliniques universitaires de Bukavu dans l’est de la RDC abonde dans le même sens et affirme que « dans les milieux urbains, on a un recours assez facile à la césarienne. La maîtrise des techniques de chirurgie, de l’anesthésie, etc. font que la césarienne n’est plus aussi débilitante qu’elle pouvait l’être auparavant. On a tendance à banaliser cette opération ».

Sédentarité

Parmi les autres raisons qui expliquent l’augmentation du nombre de césariennes en Afrique, Kadiatou Traoré, sage-femme maitresse à la maternité du centre hospitalier universitaire du Point G de Bamako au Mali, cite les facteurs socio-économiques.

« De plus en plus de femmes urbaines adoptent un mode de vie sédentaire et évitent l’activité physique pendant la grossesse, ce qui augmente le risque de complications obstétricales et la fréquence des césariennes », dit-elle.

En effet, selon les spécialistes, cette sédentarité est susceptible d’entraîner un certain nombre de maladies plutôt rares autrefois, mais qui, elles aussi, voient leur prévalence exploser en Afrique ces dernières années, créant de facto une relation de cause à effet entre les deux phénomènes. C’est ce qu’essaie de démontrer Patient Wimba.

« Si la mère a des pathologies qui ne lui permettent pas de supporter un accouchement par voie basse, comme le diabète, l’hypertension, les maladies du cœur, les maladies des poumons comme l’asthme, elle n’aura pas la force pour exercer la poussée qu’il faut pour faire sortir le bébé. Le travail étant un stress supplémentaire, on peut décider de faire une césarienne pour lui éviter les efforts liés à l’accouchement », soutient le médecin.

Pour Idi Saïdou, le facteur de l’âge de la parturiente n’est pas à négliger. Car, le fait d’avoir de plus en plus de filles qui tombent enceintes trop jeunes ou à un âge avancé contribue également à favoriser le recours à la césarienne sur le continent.

« Les filles qui, hier se mariaient à 18 ans environ se marient maintenant dans la trentaine. Elles sont déjà devenues faibles et n’ont toujours pas cette capacité d’accoucher normalement. Car, dès qu’une femme enceinte dépasse 36 ans, l’accouchement devient un accouchement à risque », explique-t-il.

En conséquence, ajoute l’épidémiologiste, quand une femme qui a 36, 37 ou 38 ans décide d’accoucher, « on ne va pas la laisser souffrir jusqu’à ce qu’elle perde sa vie ! On va faire une intervention pour l’aider à avoir son enfant. »

Une démarche que corrobore Cyrille Omokala Epenge, gynécologue-obstétricien en RDC : « Lorsqu’une dame qui n’a jamais eu d’enfant se présente avec une grossesse, mais avec un âge très avancé, nous allons préférer ne pas faire courir à cet enfant-là les risques d’un accouchement par la voie basse et nous allons indiquer une césarienne »,.

Tous les experts font savoir que ce risque qui existe chez la femme âgée, on le retrouve aussi chez la jeune fille de moins de 18 ans. A les en croire, la sexualité et le mariage précoces de jeunes filles de 14, 13, voire 12 ans qui continue d’exister dans certains pays constituent aussi un facteur d’augmentation des césariennes dans la mesure où le corps de ces enfants n’est pas encore suffisamment mature pour supporter un accouchement normal.

« Dans certains coins de notre pays, les grossesses précoces, ajoutées à des consultations prénatales non respectées sont associées aux accouchements par césarienne parce que lorsqu’une femme tombe enceinte à treize ans, à ce moment-là, son bassin n’est pas encore suffisamment développé pour un accouchement par voie basse », martèle Patient Wimba.

Césarienne par complaisance

Illustration à l’hôpital public de Katako-Kombe, localité du centre de la RDC où les femmes ont généralement leurs premières grossesses en très bas âge et sont régulièrement sur le billard pour accoucher.

« Sur cinquante accouchements, nous pouvons avoir douze ou dix césariennes, soit au moins deux césariennes sur dix accouchements et dans notre milieu, la plupart de ces cas sont liés à l’âge. Nous avons souvent des gens qui viennent, l’âge inférieur à seize ans, des gens de douze ans. Cela va nécessiter une césarienne », témoigne Josée Apendeki, l’accoucheuse en chef.

Dans cet établissement, le ratio des césariennes a pu parfois être très élevé. Selon les chiffres fournis par la direction, en 2022 par exemple, sur un total de 676 accouchements, 155, soit près de 23%, ont été des interventions chirurgicales.

L’OMS ne disposant pas de statistiques spécifiques pour chaque pays d’Afrique subsaharienne, SciDev.Net a dû s’appuyer sur les données des études intitulées « The Landscape of Cesarean Section in Sub-Saharan Africa and South and Southeast Asia » (2017) et « Disparities in caesarean section prevalence and determinants across sub-Saharan Africa countries » (2018) pour constater à quel point la situation varie d’un pays à un autre.

Mais, toutes les césariennes pratiquées aujourd’hui en Afrique sont-elles toujours médicalement justifiées ? « Non », répondent les experts qui pointent deux nouveaux paramètres qui rentrent en ligne de compte.

D’un côté, on a un phénomène de préférence qui commence à devenir récurrent et qui contribue à rallonger la liste des accouchements par césarienne.

Patient Wimba constate ce phénomène particulièrement dans les grandes villes. « De plus en plus, nous avons des césariennes par convenance, c’est-à-dire à la demande de la gestante ou du couple ; puisque dans les villes, les gens sont au courant de ce qui se passe ailleurs : en Europe, en Chine ou au Brésil… », dit-il.

Le gynécologue-obstétricien Cyrille Omokala Epenge décrit les circonstances de cette césarienne d’un type nouveau : « Lorsqu’une dame enceinte préfère accoucher par césarienne alors qu’elle est en dehors de toute complication obstétricale, c’est-à-dire, qu’elle a un bon bassin et elle a de bonnes contractions, alors, nous lui expliquons toutes les conséquences possibles. Mais si elle persiste, nous prenons à témoin le mari et les dispositions légales le permettent… Il y a des couples qui ne veulent pas que la femme subisse la douleur de l’enfantement ».

Au Mali, à en croire Amadou Bocoum, ce type de césarienne est appelé « césarienne de complaisance ». « Généralement, elles sont réalisées dans des structures privées. Car, dans les hôpitaux publics, il faut qu’il y ait une indication médicale pour la césarienne et c’est le médecin qui juge si une patiente doit subir une césarienne. Donc, le médecin ne peut pas faire la césarienne simplement parce qu’une femme est venue et l’a demandée », explique le secrétaire général adjoint de la Société malienne de gynécologie-obstétrique.

De l’autre côté, il existe de plus en plus des césariennes qui sont bel et bien prescrites par le médecin ou un centre de santé sans pour autant être vraiment nécessaires. Dans un communiqué de presse publié en 2021, l’OMS écrit au sujet des césariennes que « la hausse des taux suggère un nombre croissant de procédures médicalement inutiles et potentiellement dangereuses ». « Toutes les césariennes pratiquées actuellement ne sont pas nécessaires pour des raisons médicales. Les interventions chirurgicales inutiles peuvent être nocives, tant pour la femme que pour son bébé », insiste l’organisation.

Résidant à Yaoundé au Cameroun, Nadia Tajip raconte comment elle y a échappé « d’extrême justesse » lorsqu’elle devait mettre au monde son dernier enfant né en 2020. « Je m’étais rendue en pleine nuit dans l’hôpital de district où j’avais fait toutes mes visites prénatales sans qu’on m’annonce un quelconque problème avec ma grossesse », raconte la jeune dame.

« L’enfant était un peu gros, mais malgré quelques souffrances, la sage-femme en service avait réussi à m’accoucher par voie basse. Sauf que le lendemain, elle a été copieusement réprimandée par le major qui lui reprochait de ne m’avoir pas envoyée au bloc opératoire pour une césarienne… », poursuit-elle, encore surprise aujourd’hui.

Césarienne économique

L’activiste Chantal Faida confirme aussi l’existence de telles pratiques en RDC : « J’ai déjà été alertée par ces cas de césarienne économique. La plupart des femmes disent que c’est devenu une pratique dans les hôpitaux, qu’ils soient publics ou privés, de recourir à la césarienne. J’ai entendu plusieurs femmes qualifier cela de pratique économique parce que ça rapporte beaucoup plus d’argent aux hôpitaux qu’un accouchement par voie basse qui, généralement, ne coûte pas cher », confie-t-elle.

Dans le contexte d’un pays comme la RDC où les syndicats des médecins sont régulièrement en grève pour réclamer de meilleurs salaires, la probabilité pour une telle tentation est grande. D’ailleurs, le chercheur Patient Wimba ne l’exclut pas, même si, en tant que professionnel de la santé lui-même, il adopte un ton neutre.

« Si des gens font des césariennes pour des raisons d’argent, c’est peut-être pour arrondir leur fin de mois. Je ne dis pas que je justifie cela mais ça peut être une des raisons… », essaie de comprendre le médecin.

Au regard des risques particuliers que comporte ce mode d’accouchement, Chantal Faida appelle les autorités à se saisir rapidement du problème. « C’est une question de santé publique, si ces cas de césariennes économiques sont avérés, que les autorités puissent se pencher sur cette problématique et que ces pratiques soient sanctionnées par la justice. »

Un rapport publié en 2021 par le ministère de la Santé et de la population de la République du Congo vient appuyer certaines de ces explications, en l’occurrence celles qui font de la césarienne un phénomène beaucoup plus urbain. On y apprend que plus de huit césariennes sur dix (83,8%) ont été réalisées à Pointe-Noire (59,8%) et Brazzaville (24,0%) en 2019, contre 81,8% en 2016 et 70,52% en 2013.

Idem au Mali où sur les 45 842 cas de césarienne enregistrés en 2022, 13 650 (29,8%) l’ont été à Bamako qui se situe ainsi en tête du classement. La capitale du pays étant suivie de loin par Sikasso avec 7 685 cas (16,8%) et Koulikoro avec 4 522 (10%).

Cependant, passer par la césarienne pour donner la vie demeure un défi majeur pour de nombreuses femmes qui redoutent cette opération. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette peur qui, pour Idi Saidou, est « normale ». D’après Sabine Touangnou, épouse Djingui, doctorante en microbiologie médicale à l’université de Yaoundé I au Cameroun, « le principal facteur est la peur de ne pas survivre à l’anesthésie. Parce qu’au départ, la césarienne était une opération chirurgicale qui se faisait sous anesthésie générale. Alors, beaucoup avaient peur de s’endormir et ne plus se réveiller », explique-t-elle.

Pour ne rien arranger, les quartiers des villes et villages d’Afrique sont souvent endeuillés par des décès de femmes à la suite de cette intervention. A en croire les informations consignées dans l’édition 2022 du SNIS, 53 femmes sont décédées au Mali après une césarienne en 2020, contre 73 en 2021 et 55 en 2022. Ce qui représente des proportions respectives de 0,17%, 0,2% et 0,14% par rapport au nombre de césariennes réalisées pendant les années en question dans le pays.

Dans une note d’information publiée en avril 2024, l’OMS indique que « la mortalité maternelle est inacceptablement élevée. Environ 287 000 femmes sont décédées pendant et après la grossesse et l’accouchement en 2020 ». Ajoutant que l’Afrique subsaharienne à elle seule représentait environ 70 % des décès maternels, soit 202 000…

Bien plus, l’environnement opératoire « avec les pinces, les membres du personnel qui ont le visage voilé, la couleur verte de leur tenue qui est différente de la couleur blanche à laquelle les patientes sont habituées,…  contribuent à entretenir la peur de la césarienne », poursuit Sabine Touangnou.

Par ailleurs, la césarienne limite le nombre de naissance à trois ou quatre par femme. Ce qui est insignifiant dans un contexte africain où les parents ont tendance à préférer des familles nombreuses de six enfants voire plus. « Du coup, passer par une césarienne signifie que la femme est incapable de donner autant d’enfants que possible à son époux. Et comme on est dans une société patriarcale, on se dit que le monsieur aura tendance à aller chercher d’autres femmes pour lui faire d’autres enfants », explique Sabine Touangnou Epse Djingui.

Enfin, il y a l’expérience de celles qui passent par la césarienne qui racontent les douleurs et leurs difficultés à profiter de leurs enfants après l’accouchement. Car, avec la césarienne des proches doivent généralement s’occuper de la nouvelle maman et de son bébé jusqu’à ce qu’elle soit apte à travailler. Ce qui n’est pas le cas avec l’accouchement par voie basse.

Rachelle Wessinou, présidente de l’association des femmes baptistes de Bamako, affirme avoir assisté à huit césariennes parmi les femmes de son organisation, dont deux ont connu une fin tragique. « Elles ont perdu la vie parce qu’elles n’avaient pas pu suivre correctement les consultations prénatales au début », déplore-t-elle.

D’où l’hypothèse d’Amadou Bocoum : « Il se peut que les décès suite aux césariennes ne soient pas liés directement à l’acte de la césarienne, mais plutôt à la maladie qui a poussé à ce qu’on fasse une césarienne, à l’exemple de l’hypertension, du diabète ou d’autres complications… », analyse le gynécologue.

En effet, ajoute-t-il, l’hypertension artérielle constitue la première cause de décès suite à une césarienne, notamment à cause de ses complications que sont l’hémorragie et l’éclampsie.

Gratuité des examens prénataux

D’après l’annuaire statistique des hôpitaux de 2020, parmi les complications obstétricales directes, l’éclampsie et l’hémorragie sont les principales causes de décès maternels avec respectivement 43% et 39%. Pour les complications obstétricales indirectes, l’anémie représente 44% des cas de décès maternels, en hausse par rapport à 2019 (41%).

A en croire Patient Wimba, on a eu beaucoup de cas de morts maternelles qui sont survenues après la césarienne dans la province du Tanganyika en RDC, et les causes étaient surtout infectieuses. Il indique au passage que 217 femmes avaient ainsi perdu la vie en 2022.

Dans ce pays d’Afrique centrale, les professionnels de la santé accusent aussi leurs conditions de travail. « Pendant les césariennes, nous avons besoin de lumière tant il faut aussi qu’on réanime les femmes. Malheureusement, souvent le courant peut être interrompu. A ce moment-là, on commence à faire des césariennes avec des torches », déplore Josée Apendeki.

Cette accoucheuse de RDC ajoute qu’après la césarienne, son équipe fait face à d’autres difficultés à l’instar de l’absence d’équipements nécessaires pour prendre en charge les hémorragies du post-partum, comme les anticoagulants, entre autres ».

« Les décès après la césarienne arrivent le plus souvent en Afrique lorsqu’on ne connaît pas les antécédents médicaux d’une parturiente qui arrive en urgence », renchérit Youssouf Traoré, gynécologue au service de maternité de l’hôpital Gabriel Touré de Bamako.

Quoi qu’il en soit, Thera Tiounkani, chef de service de gynécologie-obstétrique du Centre hospitalier universitaire (CHU) du Point G de Bamako, exprime son inquiétude face à cette situation et pense dès lors que la solution résiderait dans la gratuité des examens prénataux.

En effet, la réalité révèle qu’au Mali, la plupart des femmes ne bénéficient pas de consultations prénatales en raison des coûts élevés, qui peuvent atteindre jusqu’à 1000 Fcfa pour une consultation standard et 6 000 Fcfa pour un bilan initial, en dehors des examens qui les suivent.

« En tant que gynécologues, nous sommes témoins des conséquences tragiques de ce manque d’accès aux soins prénataux. Les complications qui auraient pu être détectées et traitées tôt deviennent des urgences médicales lors de l’accouchement », regrette Thera Tiounkani.

« Quand une femme vient en consultations prénatales, il y a des médicaments que nous devons lui donner: des vitamines, des antipaludéens, par exemple. Jadis, le gouvernement nous les donnait. Mais depuis juillet 2022, cet appui ne vient plus. Lorsque nous avons ces intrants, les femmes sont prises en charge correctement, ce qui réduit le taux des césariennes », justifie Clément Omatete, infirmier et directeur des soins à l’hôpital public de Katako-Kombe en RDC.

Quant aux césariennes motivées par le profit, tous les acteurs pensent que pour les combattre, il faudrait davantage actionner le levier de la déontologie et appliquer « sévèrement » les sanctions prévues par les lois.

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Cette enquête a été écrite par Mardochée Boli, Idelette Bissu’u, Maghene Deba,  Julien Chongwang et Sandrine Gaingne et premièrement publié par  SciDev.net puis repris sur Sciences de chez nous. 

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