Le Centre National de Recherche Agronomique (CNRA) de Bouaké a introduit une méthode de multiplication rapide du manioc afin de soutenir la production nationale de semences de qualité. Grâce à un travail en laboratoire fondé sur la culture in vitro, les chercheurs obtiennent des plantules saines en seulement trois semaines, contre plusieurs mois auparavant.
Ce procédé, qui repose sur l’assainissement et la multiplication contrôlée des variétés locales, permet d’accroître les volumes de production tout en améliorant la vigueur des plants mis à disposition des producteurs. Le CNRA fabrique également ses propres substrats organiques, renforçant ainsi son autonomie technique.
Déployée dans le cadre du Projet de Développement des Chaînes de Valeurs Vivrières (PDC2V), cette avancée offre aux producteurs un accès élargi à des semences certifiées et contribue à soutenir les objectifs nationaux de sécurité alimentaire.
Pourquoi cette innovation pourrait bénéficier au Mali
Au Mali, l’agriculture occupe une place centrale dans l’économie nationale : une part importante de la population vit de l’agriculture.
La culture vivrière, des tubercules comme le manioc, représente un levier important pour la sécurité alimentaire, surtout dans les zones rurales.
Selon les données récentes, la superficie récoltée de manioc au Mali a atteint un record de 10 597 ha en 2020. La production de manioc reste modeste, avec une surface récoltée.

Ce faible niveau de production contraste avec le potentiel qu’offre le manioc, une plante rustique, tolérante à des sols pauvres et à des conditions climatiques difficiles, parfois plus adaptée à certaines zones que des céréales plus exigeantes.
L’adoption d’une technique de multiplication rapide, telle que celle mise en œuvre par le CNRA de Bouaké, offrirait au Mali l’opportunité d’intensifier plus efficacement ses plantations de manioc. En accélérant la production de semences saines et homogènes, le pays pourrait renforcer la fiabilité de la filière, améliorer les rendements et sécuriser l’approvisionnement des producteurs. Un tel progrès contribuerait directement à réduire la vulnérabilité alimentaire des ménages ruraux, à diversifier les cultures vivrières et à consolider l’autonomie alimentaire nationale.
L’expérience d’autres pays africains démontre d’ailleurs le potentiel économique du manioc. Au Nigéria, par exemple, l’intégration du manioc dans la chaîne de transformation alimentaire a permis de substituer environ 15 % du blé importé. Ce qui aurait généré une économie estimée à 408 millions USD en 2021. Au-delà de son rôle alimentaire, le manioc permet la production d’éthanol utilisé dans les carburants, les solvants, la cosmétique, la pharmacie ou encore les spiritueux. Le marché mondial de l’éthanol est évalué à près de 100 milliards USD en 2024.
Sur le plan commercial, les exportations africaines de produits dérivés du manioc ont atteint environ 81 000 tonnes en 2024, pour une valeur de 20 millions USD. La Tanzanie et l’Ouganda dominent ce marché continental, avec respectivement 66 000 tonnes (14 millions USD) et 11 000 tonnes (2,9 millions USD).
En développant localement ses capacités de production, depuis les plantules jusqu’aux substrats organiques, le Mali pourrait non seulement réduire sa dépendance aux importations d’intrants agricoles, mais aussi bâtir une filière plus durable, compétitive et adaptée à ses réalités climatiques.
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Cet article a été écrit par Mardochée Boli.
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