Mali : quand l’expertise locale sauve les mères et les nouveau-nés
En ce 8 mars 2025, journée de la femme des droits, Sciences de chez Nous met la lumière sur ces héroïnes de l’ombre : les accoucheuses traditionnelles du Mali. Malgré l’isolement et l’insécurité, elles veillent sur les mères et les nouveau-nés. Elles sauvent des vies grâce à leur engagement et au soutien de Médecins Sans Frontières.

Dans sa petite case de Niono, au centre du Mali, en proie aux conflits armés et à l’insécurité, une femme veille dans la pénombre, son regard rivé sur une jeune mère qui s’apprête à donner la vie. Arsoukou Traoré, accoucheuse traditionnelle depuis plus de vingt ans, a assisté des centaines de naissances dans ce village où l’accès aux soins de santé demeure un véritable défi.

Pour beaucoup de femmes enceintes, la peur de la route et la distance sont des barrières infranchissables. « La plupart des femmes enceintes qui viennent me voir vivent loin des structures de santé. Avec l’insécurité qui règne, elles ont peur de voyager, surtout la nuit », confie Arsoukou. Heureusement, les choses ont changé depuis l’arrivée de Médecins Sans Frontières (MSF) en 2022, qui travaille en collaboration avec le ministère de la Santé pour améliorer l’accès aux soins maternels.
Aujourd’hui, grâce aux formations dispensées par MSF, Arsoukou sait repérer les signes d’alerte : hypertension, anémie, complications fœtales… Son rôle est essentiel. Elle accompagne les grossesses, prodigue des soins de base et assure des accouchements lorsque les conditions le permettent. Lorsque la situation l’exige, elle guide les femmes vers le centre de santé de N8, où elles reçoivent une prise en charge gratuite pour elles et leur nouveau-né.
Les chiffres témoignent du succès de cette initiative. En 2024, les équipes de MSF et les accoucheuses traditionnelles ont réalisé plus de 30 100 consultations prénatales, 8 100 consultations post-natales et ont assisté plus de 10 700 accouchements. Plus de 5 000 dépistages de la tension artérielle ont été effectués et 31 100 boîtes de fer ont été distribuées pour lutter contre l’anémie. Sans compter les 42 400 séances de sensibilisation menées au sein des communautés.
À travers tout le district sanitaire de Niono, mais aussi dans ceux d’Ansongo, Koro, Douentza, Gourma de Tombouctou, Goundam et Ténenkou, les résultats sont visibles. Les structures de santé communautaires reçoivent moins de cas compliqués, car les accoucheuses traditionnelles assurent une prise en charge précoce. Moins de décès maternels, plus d’enfants vaccinés, et surtout, plus de femmes qui peuvent accueillir leur enfant dans un cadre sûr.
Malgré ces progrès, les défis restent nombreux. Le manque de transport pour les références urgentes, l’insuffisance d’outils de travail et la formation continue sont autant d’obstacles qui persistent. MSF répond en recrutant des sage-femmes chargées d’accompagner ces matrones, en leur fournissant des équipements médicaux tels que tensiomètres et désinfectants.
Aujourd’hui, chaque bébé qui pousse son premier cri entre les mains d’Arsoukou est une victoire contre la mortalité maternelle et infantile. Dans ces villages reculés, loin des hôpitaux modernes, des femmes comme elle réalisent un miracle quotidien : celui de donner la vie en toute sécurité.
••••••
Cet article a été écrit avec Médecin sans frontière au Mali et approuvé pour publication par la rédactrice en chef de Sciences de chez Nous, Fatimatou Diallo.
➤ Bien que nous ayons mis en place un processus éditorial robuste et bien rodé, nous ne sommes qu’humains. Si vous repérez des erreurs ou des coquilles dans nos productions, veuillez-nous en informer par courriel à l’adresse : correction@sciencesdecheznous.com.