Une nouvelle étude avertit que la déforestation dans trois pays d’Afrique de l’Ouest — le Ghana, le Niger et le Nigeria — aggrave la crise de l’eau dans la région, menaçant la santé et les moyens de subsistance de plus de 120 millions de personnes.
S’appuyant sur 12 années de données satellitaires, le rapport réalisé par WaterAid et Tree Aid établit un lien direct entre la perte de forêts et la diminution à la fois de la qualité et de la quantité d’eau douce.
Pour chaque 1 000 hectares de forêt détruits au Niger et au Nigeria, près de 10 hectares des eaux de surface disparaissent, exposant davantage les communautés aux maladies, à l’insécurité alimentaire et à la déshydratation. Au Niger, où 99,5 % de l’eau douce est déjà impropre à la consommation, la déforestation a aggravé la sédimentation et la pollution, selon le rapport.
« Les arbres et l’eau sont l’essence même de la vie dans les communautés forestières d’Afrique de l’Ouest et dans le monde entier. Les arbres attirent l’eau dans la terre, enrichissent les sols des agriculteurs et protègent les terres des inondations. Mais, à mesure que les forêts disparaissent, l’eau s’évapore à une vitesse implacable », déclare Abdul-Nashiru Mohammed, directeur régional de WaterAid pour l’Afrique de l’Ouest.
Les chercheurs, parmi lesquels figurent les scientifiques ghanéens Justine Kojo et Thomas Burns Botchwey, affirment que leurs données révèlent une « nouvelle réalité dangereuse », où la déforestation et le changement climatique se renforcent mutuellement. « Ce qui semble être plus de l’eau à la surface est souvent le signe des inondations, des ruissellements et de la pollution en profondeur », notent-ils, avertissant que la hausse temporaire des précipitations, au Ghana, masque une baisse à long terme de la qualité de l’eau.
L’étude révèle que 45 % de la population du Ghana, du Niger et du Nigeria vit désormais dans des zones à haut risque hydrique, avec 85,6 millions de Nigérians directement touchés par la perte d’eau liée à la déforestation. Le Ghana perd environ 24 800 hectares de forêt chaque année, tandis que le Niger a inversé certaines pertes, grâce à la reforestation, regagnant plus de 100 000 hectares depuis 2013.
Selon Georges Bazongo, directeur des programmes de Tree Aid, ces résultats soulignent la nécessité à initier des « programmes de reforestation et de restauration des terres fondés sur une gouvernance forestière inclusive, conciliant protection de l’environnement et besoins locaux ».
La publication du rapport à la veille de la COP30, à Belém, au Brésil, renforce l’urgence à intégrer la protection des forêts et des ressources en eau dans les engagements climatiques et financiers des gouvernements. WaterAid et Tree Aid estiment que traiter séparément ces deux crises serait « voué à l’échec ».
Pour Dr Sulagna Mishra, qui a coordonné un rapport de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) sur l’état des ressources en eau dans le monde, publié mi-septembre dernière, l’Afrique pourrait porter haut l’eau comme thème transversal des négociations à la COP30.
Le rapport de Water Aid et Tree Aid prévient que le changement climatique amplifie la crise dans la mesure où la hausse des températures, les pluies irrégulières et les phénomènes météorologiques extrêmes accélèrent la perte des forêts et la dégradation des sources d’eau.
Gestion intégrée des ressources en eau
Au Ghana, les pluies plus abondantes peuvent temporairement augmenter le niveau de l’eau, mais masquent une baisse à long terme de la qualité. À travers la région, les inondations et les sécheresses deviennent plus fréquentes et plus sévères.
Les chercheurs préviennent que, sans une adaptation climatique urgente et la protection des forêts, des millions d’Ouest-Africains feront face à une aggravation de la pénurie d’eau et de l’insécurité alimentaire, alors que les pressions combinées de la déforestation et du changement climatique s’intensifient.
Dr Nazif Zimari, spécialiste en gestion intégrée des ressources en eau à l’ONG GRET basée au Togo, a déclaré à Mongabay que les pays africains doivent s’orienter vers « une gestion intégrée des ressources en eau (GIRE), qui combine la planification locale et la coopération transfrontalière, l’usage de données fiables et le financement durable ».
« Sans une approche concertée reliant les secteurs de l’agriculture, de l’énergie, de l’eau potable et de l’environnement, les efforts resteront fragmentés, et l’eau continuera d’être un facteur de vulnérabilité au lieu d’être un levier de résilience », signale-t-il.
••••••••••
Cet article a été publié par Mongabay et repris par Sciences de chez Nous .
➤ Bien que nous ayons mis en place un processus éditorial robuste et bien rodé, nous ne sommes qu’humains. Si vous repérez des erreurs ou des coquilles dans nos productions, veuillez-nous en informer par courriel à l’adresse : correction@sciencesdecheznous.com.
Pour toutes autres préoccupations
Envoyez-nous un email